En collaboration avec la direction et les équipes pédagogiques de l’Externat Notre Dame à Grenoble, se déroulera pour la deuxième année consécutive, une intervention auprès des élèves des classes de 5ème, pour les faire réfléchir à leur usage principalement, de leur téléphone portable.
Lundi 17 janvier 2022 | Intervention à l'externat Notre Dame

L’année précédente, nous avions proposé une réflexion plus large : « Les écrans » en général.
Nous avions invité les élèves à préparer cette intervention en cherchant avec leurs parents des « images d’écrans » afin, déjà, de les sensibiliser plus consciemment à leurs présences ainsi qu’à leurs places dans leur vie quotidienne. L’intention était également de pouvoir ouvrir un espace de paroles parents-enfants sur le sujet.
J’avais constaté une grande richesse dans la diversité des expériences et du regard des élèves face « aux écrans ». Pour la plupart, des règles dans l’utilisation des écrans étaient déjà présentes à la maison, et les élèves avaient facilement tendance à les comprendre et à les justifier.
Mais qui dit « écrans » dit Internet !
Ainsi, des thématiques autour des contenus étaient régulièrement revenus : l’image de soi véhiculée sur les réseaux les sociaux, développer du discernement sur les informations déversées sur les réseaux, apprendre à faire la différence entre « le vrai et le faux », la peur de louper des informations (ce que les américains appellent : The fear of missing out), l’ennui quand les écrans s’arrêtent, le besoin d’être sur son portable pour faire passer le temps, la possibilité d’être en lien, le risque du harcèlement. Mais aussi toute l’utilité d’internet pour chercher des informations, l’efficacité, la rapidité.
Aujourd’hui, nous savons parfaitement que parler « des écrans » ne veut rien dire : on parle d’utilisation des écrans, du type de support, des contenus recherchés, des applications utilisées, des objectifs, du temps passé en fonction de l’activité effectuée.
Comment utiliser efficacement et judicieusement son téléphone, son ordinateur, de façon à en maitriser l’utilisation et non être, soi-même maitrisé par cet outil ? Car ce n’est qu’un outil, tels sont la question et l’enjeu : un usage éclairé des outils numériques. Préserver son libre-arbitre, et rester maitre de son attention.
A la suite de la première journée d’intervention, il leur avait été proposé de tenir « un journal de bord » de leur usage des écrans en leur demandant de noter les observations suivantes :
- Le temps passé sur l’écran utilisé,
- Sur quel type de support en faisant quelle activité?
- La façon dont ils se sentaient ensuite?
L’objectif de la deuxième journée était de continuer à réfléchir avec eux sur ce que cela leur avait apporté, et quelles stratégies efficaces, avaient-ils trouvé pour leur permettre de réguler leur usage « des écrans ».
Cette journée avait également pour objectif, en terme de stratégies de régulation, de faire le lien avec les outils d’entrainement à l’attention du programme ATOLE et les exercices de méditation de pleine conscience auxquels certains des enseignants de l’établissement ont été formés et qu’ils utilisent régulièrement avec leurs élèves afin de leur apporter bien-être, confiance en eux et concentration.
Cette intervention sur deux jours devait se clore avec une conférence à destination des parents afin de leur faire un retour sur cette intervention. Mais aussi de continuer à les informer sur l’utilisation des écrans avec l’éclairage des recherches dont on dispose actuellement. Et enfin, de leur proposer des pistes d’accompagnement en lien avec la compréhension de l’usage de ces fameux «écrans ». Sachant que, aujourd’hui, nous adultes, passons énormément de temps sur notre portable, sur notre ordinateur et la génération précédente devant la télé ! Les enfants se plaignent également de la non-disponibilité de leurs parents dont l’attention est elle-même captivée par ces objets devenus quasiment indispensables.
Mais cette conférence n‘a pas pu avoir lieu … COVID oblige.
Après réflexion entre l’équipe enseignante et la direction suite à cette première expérience, le projet a continué de se dessiner pour être le plus intéressant et le plus pragmatique possible pour les élèves.
Le thème cette année est donc :
« Prévention dans l’usage des écrans : améliorer l’attention, préserver la relation ».
L’accent sera recentré sur l’utilisation et la place du téléphone portable, qui, en fin de compte est le support qui prévaut de par la facilité d’utilisation et les usages multiples qu’il propose. Viennent ensuite les jeux vidéos.
L’usage des écrans et plus particulièrement du téléphone, est devenu chez les jeunes, y compris les collégiens, un outil à la fois de travail, d’information, de connexion sociale et de divertissement (pour ne pas dire distraction).
Notre attention est toujours posée sur quelque chose, la question est : sommes-nous conscients du support sur lequel nous la posons, et de ce qui l’attire ?
Maitriser notre usage des écrans c’est maitriser nos objectifs attentionnels.
On parle aujourd’hui d’ « économie attentionnelle » : nos ressources attentionnelles sont très convoitées par les médias qui font de leur captation un enjeu économique majeur.
Réfléchir à notre usage des écrans c’est choisir de cultiver notre libre-arbitre, nos capacités de discernement.
Le cerveau des adolescents est encore très immature pour résister à la tentation de l’immédiateté : les outils numériques proposent des réponses rapides, alimentent la sensation de récompense immédiate, et les contenus des réseaux sociaux sollicitent essentiellement notre cerveau émotionnel qui est naturellement très orienté vers le lien social et a tendance à être sur un mode de réponse de type automatique et réactif. Pour ne pas dire irréfléchi.
L’usage des outils numériques crée ainsi ce que l’on appelle un « conflit attentionnel » : entre « hyper attention » et « deep attention » (cf. Pr Katherine Hayles), c’est-à-dire entre une attention constituée d’une oscillation rapide entre différentes tâches, avec la recherche d’un niveau élevé de stimulation avec peu de tolérance pour l’ennui, et une attention captée par un seul objet, sur un long moment, c’est l’attention profonde. Cette dernière est essentielle au développement de l’estime de soi et au bien-être durable, car elle cultive un meilleur engagement des facultés cognitives et un niveau de présence de meilleure qualité.
Une information entre cerveau, attention et émotions
Cette année, un questionnaire sur leur usage des écrans sera proposé en amont par les enseignants aux élèves.
Nous ferons émerger ensemble les aspects dits « positifs » ou « négatifs » du portable.
Je leur donnerai une information entre cerveau, attention et émotions.
C’est ainsi que se fera le lien entre « écrans », attention et relation à l’autre.
Nous pourrons ensuite réfléchir à l’intérêt de développer un usage éclairé des écrans, et commencer à évoquer des « astuces » de régulation des écrans, en lien avec les outils développés par ATOLE et les exercices de pleine conscience.
La deuxième journée aura pour intention de revenir sur le chemin parcouru depuis la première rencontre. Et de continuer à concrétiser une posture de régulation des écrans.
Un vrai challenge! Oui !
Mais je remercie déjà l’Externat Notre Dame, la direction, les enseignants, de poursuivre ce projet de prévention, financé en partie par la Région qui perçoit sans nul doute l’intérêt d’une telle réflexion.
Et enfin je me réjouis de retrouver les élèves que j’ai toujours trouvés très impliqués et ouverts.
Je suis toujours si agréablement surprise de leur intelligence, de leur perspicacité, et surtout de leur sincérité. Je suis profondément convaincue que c’est en allant à leur rencontre, dans l’ouverture et la confiance, que nous leur donnons la possibilité de faire les choix dont ils ont déjà conscience mais dont parfois ils ne savent pas encore comment s’approcher ni comment se saisir.